Elu président du MEDEF Anjou en septembre, Bertrand Schaupp revient pour entreprise-angers.com sur le lancement du Centre d’Innovation sur la Prévention des difficultés des Entreprises (CIP) et sur la situation économique du bassin angevin. Interview.
Le 17 octobre le Medef Anjou était présent au lancement du Centre d’Innovation sur la Prévention des difficultés des Entreprises (CIP). En quoi consiste ce nouveau service ?
Bertrand Schaupp : La région comptait déjà deux CIP, un en Loire-Atlantique depuis 2008 et l’autre en Mayenne depuis 2013. Le Maine-et-Loire a désormais le sien. C’est une cellule d’écoute (1) pour les entreprises qui souhaitent évoquer leurs difficultés, trouver des solutions pour les surmonter, et ainsi éviter de passer par la case tribunal. Les consultations sont confidentielles, gratuites et proposées par une équipe de trois bénévoles : un expert-comptable, un avocat et un juge.
Les tribunaux de commerce ne disposent-ils pas déjà de cellules de prévention ?
B. S : Si mais le CIP intervient plus en amont et présente l’avantage d’offrir aux chefs d’entreprise un terrain neutre et moins intimidant.
Vous avez annoncé la mise en place d’un Pôle Jeunes pour attirer du sang neuf au sein du Medef Anjou…où en sont vos adhésions ?
B.S : Les chiffres sont à peu près stables depuis deux ans, soit environ 180 membres. Mais le Medef a besoin de plus de jeunes chefs d’entreprise pour faire évoluer ses réflexions sur les nouveaux métiers et produits d’aujourd’hui. On va organiser à leur intention des afters, des petits déjeuners et des animations spécifiques pour les sensibiliser à notre discours et voir comment ils le perçoivent.
En Maine-et-Loire, les mauvaises nouvelles s’accumulent sur le terrain social. Après Altia qui supprime 63 emplois dans la sous-traitance automobile, ThyssenKrupp annonce 258 suppressions de postes et Guérif (78 salariés) risque la liquidation. Peut-on parler d’un mal angevin ?
B.S : Thyssen est une multinationale qui fait des arbitrages stratégiques depuis son siège social en Allemagne pour rester en course dans la compétition mondiale. Les raisons évoquées pour justifier la restructuration de l’usine angevine seraient des problèmes de « surcapacités » de production qui ne sont évidemment pas liées à la compétitivité de notre territoire.
La mauvaise situation de Guérif n’est pas, non plus, un tropisme angevin, même si son marché est local. C’est une entreprise de maçonnerie qui subit, comme beaucoup d’autres, la crise générale du secteur de l’immobilier. Et quand la conjoncture est mauvaise, ce sont les plus fragiles qui sont le plus exposés.
Alors quel regard portez-vous sur la propre situation angevine ?
B.S : La situation s’est brutalement dégradée en milieu d’année 2014, surtout depuis mai. Les derniers chiffres du tribunal de commerce attestent une nette accélération des procédures (2). Les temps sont particulièrement difficiles pour le commerce, la construction et l’horticulture. Les commerçants souffrent de la baisse du pouvoir d’achat des ménages et les artisans du bâtiment sont confrontés à un recul des commandes publiques et à une réduction des subventions accordées par l’Anah aux propriétaires et syndics qui souhaitent engager des travaux de rénovation( Anah, Agence nationale pour l’Amélioration de l’Habitat, NDLR) . La filière horticole (près de 3 000 emplois en Anjou, NDLR), elle, est en pleine mutation et doit faire face à un changement des habitudes de consommation et à une forte compétition mondiale, qui vient notamment des Pays-Bas.
Justement, le Medef et Pierre Gattaz multiplient les propositions pour relancer la croissance et la compétitivité des entreprises. Beaucoup font débat, comme le travail dominical ou la réforme des seuils sociaux. Quelle est votre position ?
B.S : Sur les ouvertures de commerce le dimanche, il y a sans doute de la souplesse à apporter, à condition qu’employeurs et salariés s’y retrouvent. Mais, à mon avis, la révision des effets de seuils est une mesure plus urgente : quand vous pensez que la France compte aujourd’hui deux fois plus d’entreprises de 45 à 49 salariés que d’entreprises de 50 à 55, tout est dit. Ça signifie bien que beaucoup de dirigeants préfèrent ne pas recruter plutôt que d’avoir à répondre à de nouvelles contraintes administratives. Il y a un vrai réservoir d’emplois de ce côté-là, y compris en Anjou où je connais beaucoup d’entreprises qui gèlent l’évolution de leur effectif à partir de 48 salariés.
(1) Les rencontres se déroulent les jeudis après-midi au siège de l’Ordre des Experts-Comptables (14, allée du Haras). Pour prendre rendez-vous, composez le 0800 100 259.
(2) 460 procédures depuis janvier, contre 427 en 2013 et 381 en 2012. Le nombre de liquidations passe de 289 à 328 en un an.